Candide face à l'horreur de la guerre : Une dénonciation voltairienne de l'absurdité et de l'inhumanité du conflit armé

La guerre dans Candide : Une confrontation immédiate à l'horreur

Dès les premières pages de Candide, Voltaire plonge son héros, et par extension le lecteur, dans l'horreur de la guerre. L'extraction brutale de Candide de son "paradis terrestre", le château de Thunder-ten-tronck, est directement suivie par la rencontre avec le conflit armé. Ce n'est pas une simple péripétie ; c'est une entrée en matière qui établit d'emblée la guerre comme une force destructrice fondamentale, omniprésente dans le monde que Candide est amené à découvrir.

La "boucherie héroïque" : Une esthétisation qui masque l'horreur brute

Voltaire utilise une ironie mordante pour décrire la bataille entre les Abares et les Bulgares comme une "boucherie héroïque". Ce qualificatif, en apparence grandiloquent, ne fait qu'accentuer l'horreur sous-jacente. Loin de glorifier le combat, Voltaire met en évidence la violence gratuite et la cruauté qui s'y déroulent. La liste macabre des victimes – "vieillards criblés de coups", "femmes égorgées", "filles éventrées", "cervelles [...] répandues", "bras et jambes coupées", "membres palpitants" – est une litanie qui déshumanise la guerre, la réduisant à une somme de mutilations et de souffrances physiques. L'absence de motivation claire pour ce conflit ("sans d'ailleurs que l'on sache pourquoi") souligne son absurdité inhérente, renforçant l'idée que la guerre est souvent le produit de caprices ou d'intérêts obscurs, plutôt que de justifications légitimes.

L'universalité de la violence et la perversion du "droit public"

Le pessimisme de Voltaire se manifeste par la répétition des massacres. Le fait que Candide découvre un autre village "traité de même" par les Abares, après la destruction initiale, met en évidence la circularité et l'universalité de la violence dans le monde. La guerre n'est pas un événement isolé, mais un cycle destructeur qui se reproduit sans cesse. L'auteur s'attaque également à la prétention de ceux qui invoquent le "droit public" pour justifier leurs actions, dénonçant ces prétendus légalistes comme de simples "brutes sanguinaires". Cette critique acerbe révèle la perversion du discours officiel qui cherche à masquer la barbarie derrière des justifications fallacieuses.

La guerre, négation de l'optimisme et triomphe de l'inhumanité

Tout au long du périple de Candide, la guerre se manifeste sous diverses formes et dans différentes régions du monde : les conflits coloniaux en Amérique du Sud, les sièges en Europe de l'Est, les batailles navales et même les guerres motivées par des enjeux territoriaux dérisoires ("quelques arpents de neige vers le Canada"). Cette omniprésence de la guerre à travers le globe renforce l'idée que l'humanité est intrinsèquement portée à la violence. Pour Voltaire, la guerre est le triomphe de l'inhumanité, une négation constante de la théorie de l'optimisme, qui prétend que nous vivons dans le "meilleur des mondes possibles". La conclusion de Candide, qui perçoit "quelque chose de diabolique dans cette affaire", est le reflet de la désillusion profonde de Voltaire face à la capacité de l'homme à infliger une telle souffrance à son prochain. La guerre n'est pas seulement un mal, c'est un mal radical, presque une force maléfique, qui défie toute logique et toute rationalité.

En somme, Voltaire utilise la guerre dans Candide comme un puissant outil de dénonciation sociale et philosophique. Il la dépeint comme absurde, cruelle, universelle et fondamentalement inhumaine, sapant ainsi les fondements de l'optimisme béat de Pangloss et appelant à une réflexion profonde sur la nature de l'homme et ses choix destructeurs.

إرسال تعليق

أحدث أقدم

نموذج الاتصال